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L'Assemblée nationale vote, le 24
août 1848, une réforme postale adoptant
l'utilisation des timbres-poste que l'expéditeur colle sur
son courrier, système pratiqué en Angleterre
depuis 1840. La loi qui suit le vote est promulguée le 30.
Immédiatement, une affiche informe le public que le 1er
janvier 1849, ces timbres seront disponibles dans tous les bureaux de
poste de France, d'Algérie et de Corse.
Il reste alors à peine quatre mois pour créer, fabriquer et distribuer une première livraison de quelque 15 millions de timbres-poste, alors que rien n'a été prévu, pas même le dessin des timbres ! Il s'agit là d'une véritable course contre la montre. Considérés comme une sorte de monnaie, leur réalisation incombe au ministère des Finances qui en confie l'exécution à la Monnaie de Paris. La commission des Monnaies et des Médailles présidée par Théophile-Jules Pelouze en a la charge, ainsi que ses deux graveurs généraux, Jacques-Jean Barre et son fils Albert.
Jacques-Jean Barre qui s'est rendu à plusieurs reprises en Angleterre, en particulier en 1840, date à laquelle il a pu s'intéresser à la fabrication des timbres, "gravés en taille-douce qui se reproduisent à la molette par le procédé Perkins", offre de prendre l'affaire en mains, pour quelque 200 000 F de moins que le prix demandé par Perkins. "Pour les 106 millions de timbres nécessaires aux premiers besoins du service des Postes, la dépense s'élèverait à la somme de 26 500 F. En ajoutant les frais de gravure et de multiplication qui n'ont pas été comptés dans le prix de revient, puisqu'ils ne se renouvelleront pas de longtemps, la dépense totale de l'opération se montera à 4 500 F + 26 500 F, soit 31 000 F." Barre a une opinion sur le procédé anglais qui, à son avis, donne des résultats très moyens, et il préconise "la gravure en taille de relief sur acier ou gravure typographique, le clichage par des procédés galvanoplastiques pour la reproduction des planches servant à l'impression, et la presse typographique pour l'impression ..."
Anatole-Auguste Hulot, choisi par Barre comme adjoint pour son habileté dans la pratique de la galvanoplastie mise au point par un physicien allemand, von Jacobi, livre, le 30 novembre, la première planche typographique en cuivre pour l'impression de 150 timbres de 20 centimes. Les 5 et 17 décembre, il livrera deux autres planches. Mais pour "imprimer 300 timbres, d'une façon absolument égale, d'un seul coup de la presse à bras", Barre choisit l'imprimeur Lacrampe qui installe, à l'intérieur de la Monnaie de Paris, une véritable imprimerie. A la tête de cet atelier qui fonctionne en régie : Ghislain Taquin,"prote spécial", a en charge les couleurs et le gommage. Le papier spécial fourni par la maison Lacroix d'Angoulême, est traité pour "le fond de sûreté" chez l'imprimeur Pinard. Tout est en place. Considérant les temps de transport jusqu'aux points les plus éloignés du territoire français, il reste vingt jours pour fabriquer les 25 à 30 millions de timbres répondant aux exigences de la loi, et aux prévisions. On imprime jour et nuit. Le 1er janvier 1849, le timbre de 20 centimes noir est mis en vente dans tous les bureaux de poste de France, et, en Algérie, le 5 janvier. Tiré sur une seule
planche, le 1 franc rouge clair, qui deviendra une "star" sous le nom
de vermillon, sort quelques jours plus tard. Le 40 centimes orange ne
sortira qu'au début de février 1850.
(Documentation : Les Barre par Henri Regnoul-Barre et Les premiers timbres français par Jean L. Angot). |